J'appelle Focus Collectif, c'est-à-dire comment est-ce qu'en collectif, on peut avoir un focus qui nous permet d'être forts, beaucoup plus intelligents, et donc pour ça, d'installer une sorte d'ingénierie collective et individuelle qui nous permet d'être plus résilients émotionnellement, parce qu'on ne nous l'apprend pas à l'école, et que les outils même qu'on apprend dans les réseaux d'écolieux et autres ne sont pas suffisants pour relever la tâche qu'on a à relever.
L’aventure Collective présente Gabriel Lechemin.
-Salut.
-Salut. Qui es-tu ? Dis-nous tout.
Non, pas tout. Mais tu veux te présenter ? C'est l'essentiel.
Gabriel Le Chemin.
J'ai 41 ans. Et je... ça fait... Ah mais les poules, là, ça suffit (humour). 41... Donc ça fait une bonne dizaine d'années maintenant que je... que je m'intéresse au collectif et que je visite des écovillages1.
J'en ai visité beaucoup autour du monde, plus d'une soixantaine, plus d'autres projets collectifs, tout ça. Je suis médiateur, je suis coach, et je suis aussi permaculteur. Merci.
-Est-ce que tu veux nous dire où on est ici ?
-Là, je suis dans un jardin prêté par une femme extraordinaire à Pouzac, à côté de Bagnères de Bigorre, où nous habitons en petite famille avec ma compagne et son enfant.
-OK. Voilà, le coq est d'accord avec nous.
Aujourd'hui, on va parler justement de projets collectifs, écovillages. Et si tu veux nous raconter un petit peu où tu en es personnellement là-dedans, si toi-même tu as des projets, comment tu en es arrivé là, eh bien, ce sera super.
-Oui.
Alors moi, j'ai un projet qu'on a redémarré il n'y a pas longtemps avec Ludivine, qui est de créer un petit... pas petit en taille par rapport à ce que beaucoup de gens s'imaginent, mais en fait grand en esprit. Donc l'idée, c'est de commencer avec un principe de permaculture qui commence à petite échelle pour faire évoluer le projet lentement, mais sûrement, et sûrement. Et donc nous, on est partis sur un terrain de 0,5 hectare, demi-hectare, avec une petite source, et deux éco-habitats, éco-construits, plus une salle commune de pratique pour faire de la permaculture sociale, puisque c'est une de mes pratiques que j'appelle Focus Collectif, c'est-à-dire comment est-ce qu'en collectif, on peut avoir un focus qui nous permet d'être forts, beaucoup plus intelligents, et donc pour ça, d'installer une sorte d'ingénierie collective et individuelle qui nous permet d'être plus résilients émotionnellement, parce qu'on ne nous l'apprend pas à l'école, et que les outils même qu'on apprend dans les réseaux d'écolieux et autres ne sont pas suffisants pour relever la tâche qu'on a à relever.
-Donc ça, c'est ce que tu dirais que tu as constaté en visitant les autres écolieux ? Oui, alors globalement, il y a un taux d'effondrement énorme, et donc c'est en gros, si je suis un petit peu ce qui est dit dans le réseau d'Ecovillages International, GEN, Global Ecovillages Network, c'est environ 1 pour 1000 qui se pérennisent, c'est-à-dire 1% qui arrive à terme de sa vision et qui se pérennisent sur 2-3 ans, et 1 pour 1000 si on compte au-delà de 3 ans, au-delà de 10 ans, quoi. Donc ce n'est pas beaucoup, et je pense qu'il y a beaucoup de monde imaginaire autour de ça, c'est-à-dire il y a une idée de fuir la société telle qu'elle est, fuir le capitalisme, le problème c'est que les gens le retrouvent dans leur groupe, c'est-à-dire qu'ils ne se sont pas décapitalisés, ils ne se sont pas transformés, ils ne se sont pas déconstruits, et sur quelle base ils se reconstruisent, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas posé les bases pour se reconstruire. Et c'est l'erreur qui se pratique à 99,99% des cas, il y a que de très rares exceptions qui se pérennisent, parce qu'elles ont réussi à penser en profondeur, c'est-à-dire pas seulement philosophiquement parlant, mais dans la pratique, c'est-à-dire qu'elles ont des pratiques qui sont ancrées et vécues par la plupart des membres du collectif, qui permettent d'asseoir sur le long terme une culture commune, c'est-à-dire qu'on a des références en commun, c'est plus la référence gagne de l'argent et tu as une bonne vie, mais c'est faisons nos pratiques ensemble et nous avons une bonne vie.
Donc voilà, c'est un changement de paradigme complet. Changer le point d'origine, changer ses racines, donc ça veut dire peut-être se dépoter, se retirer ses racines d'un endroit pour se rempoter ailleurs, et ce n'est pas facile, parce que du coup la famille peut réagir à ça, peut se dire mais qu'est-ce qui se passe, le gars est parti dans une secte, etc. Souvent c'est des trucs qu'on entend, parce que ça fait peur, changer de culture ça fait peur, on a une culture de référence, on ne se pose pas la question d'ailleurs d'où elle vient, ni d'où viennent les racines, mais en tout cas on y tient.
Donc soit on s'y accroche, soit on s'en décroche, et je pense qu'il faut pouvoir gérer ce décrochage pour pouvoir bien s'ancrer après.
-Wow, belle entrée !
-On s'arrête là ?
-On a un petit peu de temps encore. Du coup j'ai envie de te poser plein de questions, mais je vais commencer par ce qui me semble assez basique, pourquoi ici ? Pourquoi cette région ? Et est-ce que c'est un projet déjà réel, en cours ? Enfin voilà, vous en mettez tout là-dessus.
-Alors c'est un projet bien réel, parce qu'on a une communauté de pratiques, donc des gens qui se rejoignent, qui font communauté ensemble. Ce que j'appelle communauté, c'est arriver à un niveau de confiance qui est suffisant pour pouvoir se déposer émotionnellement. C'est-à-dire, dans la culture française, c'est beaucoup la famille qui gère ces choses-là, et même quand elle est dysfonctionnelle, comme je l'ai dit, l'histoire des racines, on y reste.
Il y a des gens qui restent dans des familles dysfonctionnelles pendant des années, jusqu'à ce qu'ils se rendent compte que c'était toxique pour eux, et que leur famille était plus un poids qu'une aide. Et donc là, l'idée, c'est de reconstruire une famille de cœur, une famille d'âmes, qui vont se regrouper autour d'un but commun, qui peut changer en cours de route, mais qui doit être clarifiée aussi. C'est-à-dire, on a un objectif, mais il est clair, cet objectif.
Quelque part, c'est comme quand je parle, j'ai une intention claire, qui est de partager un message, de donner des clés, de favoriser l'empuissancement de chacun, et donc je pense à mon objectif quand je parle. C'est la même chose pour un groupe. Il faut pouvoir... C'est comme le tir à l'arc, quoi.
Je vais prendre la flèche, je sais que je vais aller quelque part. Peut-être que je manquais la cible, bon, je recommence. Mais l'idée, c'est de mettre clairement sur la table cette intention.
On a une intention, elle est claire, quoi. C'est pas juste on fait du potager ensemble, c'est pas juste on vit ensemble, parce que si c'est juste ça, le capitalisme, il est derrière la porte et il revient. C'est mon jardin, c'est mes poules, ah mais qu'est-ce que t'as fait là, je m'y attendais pas, etc.
-Et donc t'es en train de me dire qu'il y a déjà un groupe actuel pour vivre dans un éco-village ?
-Ça fait deux ans qu'on travaille sur des pratiques collectives. On peut dire qu'on a commencé avec trois pratiques principales.
Il y a les espaces d'écoute. C'est des écoutes qui sont à la fois refléter l'autre dans son sentiment, son émotion. Donc on part de la matrice des quatre sentiments, la peur, la colère, la tristesse et la joie, comme étant fondamentalement neutres.
C'est-à-dire qu'il n'y a pas des bonnes émotions et des mauvaises émotions. On n'est pas à l'école en train de dire qui est mauvais et qui est gentil. Donc là, l'idée, c'est de revenir à quelque chose de neutre, neutre dans le sens de vivant.
Chacune de ces émotions est vivante. Si je suis clairement en colère, je peux fixer des limites et empêcher qu'une personne toxique rentre dans mon espace. Donc c'est très important.
Ceux qui n'aiment pas la colère, en général, c'est ceux qui aiment bien abuser les autres. Donc je le dis pour si jamais il y a des gens qui nous écoutent, vous pouvez partir de ce podcast (humour).
-Non, non, non, restez, restez.
-Donc, pareil pour la tristesse. Oh là là, tu vas être submergé par la tristesse, il ne faut pas être triste. Non, non, non, l'idée, ce n'est pas d'être dans un parc d'attractions et de faire les marionnettes si on est triste.
Mais vraiment d'accueillir la tristesse et de voir ce qu'elle a pour nous de bénéfique. Peut-être que mes larmes, elles vont me permettre d'être plus connecté à la terre. De me dire, waouh, qu'est-ce qu'il est beau cet arbre aussi.
Et pareil pour la peur. Si je flippe et si je me rends compte de ce qui se passe dans le monde, waouh, je peux me connecter à ma flippe et l'utiliser comme un pouvoir pour ouvrir les portes et me dire, bah, il y a peut-être autre chose que je peux faire. Et pareil pour la joie.
Quand je suis joyeux, ce n'est pas parce que j'ai pris de la drogue ou parce que si je suis enthousiaste, voilà, ce n'est pas parce que j'ai pris trop de café, quoi. Mais c'est parce que, justement, je m'autorise à être joyeux et que je peux être expansif, peut-être exubérant pour d'autres, pour certaines personnes, mais surtout que je peux m'autoriser à être intense. Et cette intensité, elle est mal vécue dans la culture moderne, qui est capitaliste, qui veut des gens qui sont des moutons apathiques.
Donc si on n'a pas des gens qui sont calmes, sous antidépresseurs, que ça soit des voix de la société, des injonctions, soit des médicaments, puisque la France est le premier pays européen à consommer des antidépresseurs, eh ben, ça ne plaît pas. Donc, ces trois pratiques, je vais y revenir, j'ai fait une grosse parenthèse, ces trois pratiques, c'est les espaces des coups sympathiques, avec la peur, la colère, la tristesse et la joie, et des espaces pour parler depuis son cœur. C'est la fameuse authenticité que tout le monde veut pratiquer, mais que personne ne pratique.
Donc, tout le monde peut être inauthentiquement authentique. Là, pour être vraiment authentique, on revient au cœur, c'est-à-dire on partage, je suis en colère parce que... J'ai de la peur parce que... Et je me laisse vivre cette peur pendant que je parle. J'ai de la joie parce que... J'ai vraiment peur parce que... En fait.
Et depuis là, ça me permet de... de respirer, de sentir ce que je sens vraiment, et d'être vivant à 100%. Depuis tout à l'heure, j'ai s'autorisé à être vivant, en fait. Tu as conclu avec ça.
C'est ça. Donc ça, c'est les deux pratiques. Parler avec le cœur, écouter, faire le reflet de l'autre, mais écouter avec empathie, dans la clarté de ce que vit l'autre au service de l'autre.
Et la troisième, c'est le feedback. Les feedbacks sont des pépites. C'est-à-dire que moi, je vais pouvoir dire à l'autre, écoute, là, je ne t'entends pas vraiment.
Qu'est-ce qu'il se passe ? J'ai l'impression que tu caches quelque chose, ou que tu ne veux pas vraiment me dire ce qu'il y a derrière. Et ça, ça va aider l'autre à se repositionner. Parce qu'on ne peut pas être seul à être authentique.
Ça, c'est genre le fake 100% du développement personnel actuel. Tu vas tout voir faire tout seul et tu vas créer ta licorne et tu vas t'envoyer sur Mars. Donc, ce n'est pas le but.
Le but, c'est vraiment de rester sur Terre, de s'ancrer, et pour ça, on a besoin des autres. Et donc, le feedback, c'est de l'or.
-Trop beau.
-Merci. Dans le feedback, moi, je fais une petite parenthèse aussi. Dans le jeu du Tao, les feedbacks, c'est on parle en jeu.
Toujours parler en « je », avec ses impressions, ses ressentis, et pas tu es comme ça, pas pointé, en fait. Mais vraiment, revenir à soi. Je trouve que c'est aussi important à utiliser.
-Alors, moi, ma question de base, c'était est-ce que vous avez un groupe constitué ? Est-ce que vous avez un lieu ?
-Sachant qu'on a 5 minutes, c'est ça, encore ?
-Non, on a un peu plus, on a 10 minutes. On a 10 minutes. Et du coup, je vais te faire un bloc de questions et je vais te laisser me faire un bloc de réponses, si tu veux.
Du coup, est-ce que vous avez, donc vous êtes un groupe de personnes, vous avez un lieu, un projet d'éco- village ? Et moi, ma question vraiment que j'aimerais te poser, c'est par rapport à tout ce qu'on nomme l'entre-soi dans les éco-villages. Où vous en êtes par rapport à cette réflexion-là ? Voilà, si tu as envie de me dire un peu.
-Justement, c'est le but. Des pratiques pourraient être encore plus authentiques si on travaille sur l'authenticité comme une sorte de valeur-coeur. Eh bien, on ne va pas pouvoir se limiter à faire de l'entre-soi.
Il se passe de l'entre-soi quand on retourne dans nos propres bulles, dans nos propres univers, et qu'on se ferme dans notre vision du monde. Et l'idée, c'est en fait, de jamais, enfin pas de jamais, mais d'être le moins possible dans cette vision du monde individualiste, qui est j'ai mon petit carré ou j'ai mes petites habitudes, il faut faire avec. Non, nous on va confronter les habitudes.
C'est un travail du quotidien en fait. Ça veut dire qu'on ne va pas vivre dans le confort, bisounours, 100% à se passer de la crème. Justement, moi j'ai horreur de ça, mais il y a des gens qui tolèrent ça et qui croient que c'est ça la bienveillance.
Mais c'est pas de la bienveillance en fait. C'est de la fausse bienveillance. Ça s'appelle passer de la crème, ça s'appelle se taire, ça s'appelle mettre les choses sous le tapis.
Nous, on passe notre temps à retirer le tapis. On n'a même plus de tapis. C'est-à-dire que ça peut être vu comme une forme de confrontation permanente avec est-ce qu'on est réel ou pas.
Et donc dans ce type de contexte qui est demandeur, et bien oui ça va faire mal, oui on va se mettre en colère, oui on va se mettre triste, oui on va avoir peur justement de ce que je parlais tout à l'heure. Mais c'est le but en fait. Parce que du coup là-dedans, on va s'empuissancer les uns les autres à aller voir notre voisin, à se lancer des défis en fait, au quotidien.
Et du coup c'est ça qui va être vivant. C'est ce socle, cet humus collectif qui va être vivant en fait, où on va s'impulser et on va se donner gentiment des coups de pied aux fesses en fait. Parce que l'être humain tout seul, dans le contexte capitalistique actuel, et bien il a tendance à s'enfermer dans son confort, un confort matérialiste, dans lequel il pense a priori, par illusion, que tout va bien.
Sauf qu'on le sait très bien, tout ne va pas vraiment bien sur la planète, etc. et entre les êtres humains. Donc on va directement aller confronter et surtout pas mettre des gens sur un pied d'estal, on va travailler non pas sur une horizontalité mais sur le côté chaotique du fonctionnement, c'est à dire un côté organique, désorganisé, organisé.
-Ça c'est chaotique ?
-Oui, le chaordisme c'est un chaos organisé, un chaos structuré qui va permettre à chacun de pouvoir vivre avec sa vraie vitalité, ses vraies impulsions, à être vraiment vrai dans le groupe et pas être soumis à une structure dogmatique imposée, c'est à dire on fait de la sociocratie, on fait de l'holacratie, on fait du machin crassi et ça encrasse, quelque part. Donc l'idée c'est de se décrasser d'abord en tant qu'être humain et on fait ça. Et on fait plein d'autres pratiques, là je vais pas avoir l'envie de poser tout de suite sur la table mais en gros ça demande de poser les choses quatre sur table et d'être honnête en fait, pas jouer au poker en permanence mais justement au contraire de révéler ses cartes et de dire ben voilà ce qui se passe pour moi là.
Donc j'ai besoin d'un coup de main, j'ai besoin que tu me réveilles, j'ai besoin d'être écouté, là ça va pas du tout, je suis à plat, est-ce que tu peux m'écouter pour voir ce qui se passe ? Et hop, c'est ça l'empuissancement. Ok, et alors du coup je relèverai un petit peu en disant, comment tu l'as appelé ? Chaordique. Chaordique.
C'est aussi partager ses joies, il y a une forme d'équilibre, il n'y a pas que ce qui ne va pas. C'est là où j'en viens que la peur, la colère, la tristesse, ce n'est pas ce qui ne va pas. Et c'est là où on peut changer ses représentations sur les sentiments et les émotions.
Et c'est pour ça, et merci de poser la question parce que tu fais l'erreur pour les autres, c'est que dans la culture moderne, il y a toujours cette coloration, et dans le New Age et j'entends le développement personnel aussi, cette coloration de les sentiments sont mauvais, et les émotions sont mauvaises. Ou en gros, la tristesse, la peur, la colère, la tristesse sont mauvaises, et la joie est bonne. Et en fait, non.
Tu peux être joyeux parce qu'une personne se met vraiment en colère. Ah ça y est enfin, elle se met en colère. Mais génial, elle va pouvoir poser ses limites, elle va pouvoir arrêter de se faire marcher dessus, et arrêter de se mettre en couple avec des hommes relous, et possessifs.
Par exemple. Je nomme qu'une raison de se mettre en colère. Un exemple.
-Et du coup, j'ai envie de te reposer une autre question, par rapport au temps que ça peut prendre au quotidien, avec au village, de faire, d'utiliser ces outils-là, de faire tout ce dont tu nous parles là, est-ce que ça ne donne pas un effet de risque de prendre trop de temps ? ou c'est ok, c'est le jeu, si tu veux nous dire.
-Alors moi, je propose de sortir du contexte orthogonal et abyssal, je fais exprès un jeu de mots là-dessus, sur ces tableaux à deux entrées, qui sont le temps et l'argent. Sauf que c'est deux grosses bullshits, c'est-à-dire de la mouise, si je puis parler posément, de la culture moderne capitalistique dominatrice.
C'est-à-dire que tu vas chercher, il y a des anthropologues qui ont fait des recherches là-dessus, sur les peuples premiers, etc., ils n'ont pas le concept du temps, ils n'ont pas le concept de l'argent. Nous on l'a, et on centre notre culture sur le temps et sur l'argent. Donc à partir du moment où vous réfléchissez votre projet d'écovillage sur du temps et de l'argent, ça veut dire que votre écovillage est faible en termes de valeur.
Il n'a pas des valeurs qui sont plus puissantes que le temps et l'argent. Donc, ça sera un projet capitaliste greenwashing. Même si c'est estampillé avec un label éco, vous faites de la sociocratie et vous n'êtes en fait que entre blancs de la trentaine.
Ou la quarantaine. Ou la quarantaine, voilà. Donc, en fait, c'est normal.
Vous venez d'une culture de blancs que vous n'avez pas voulu déconstruire, et voire vous allez faire de la réappropriation culturelle avec un peu de mettre indigénisme dedans, un peu d'aborigène dedans, et voilà. Donc, je peux paraître un peu piquant quand je dis tout ça, mais c'est vraiment pour déconstruire ce qu'il y a derrière la culture, pour moi, qui est plutôt une déculture européenne, et plutôt pour aller creuser davantage les racines qui ont été coupées. Il faut savoir qu'en Europe, il y avait des racines qui étaient très profondes, dans le domaine de l'alchimie, de la sorcellerie, d'autres façons de se guérir, et donc là, j'ouvre les portes à 360°, et à tous ces pans de la société qui ont tendance à être éradiqués, c'est-à-dire l'école à la maison qui est interdite à l'heure actuelle, et les thérapies alternatives qui sont interdites en France, comme chacun peut le savoir, elles ne sont pas interdites, mais de facto, elles sont interdites parce que l'administration verrouille tout.
Donc, en fait, on se coupe de ces racines-là, qui sont aussi valables, c'est-à-dire que ce n'est pas l'une contre l'autre, ce n'est pas des guerres de culture, mais comment est-ce qu'un écovillage peut respecter ces valeurs et les ancrer suffisamment fortement pour ne pas être envahi et colonisé par cette notion de temps et d'argent ? Donc, comment est-ce que je peux ressourcer, c'est-à-dire revenir à la source de mes valeurs, pour ancrer le contexte de cet écovillage dans une nouvelle culture ? Pas une culture qui soit possiblement, potentiellement, j'ai le mot anglais là, hijackée, mais piratée, par le capitalisme, d'une manière ou d'une autre. Et ça, ça s'apprend par des pratiques, et c'est ce qu'on a fait pendant deux ans dans notre écovillage, dans notre projet culturel, du coup, de transformation culturelle, qui a vocation à faire grandir petit à petit notre groupe. Et du coup, on sort du temps.
C'est-à-dire, notre but, ça n'est pas d'être dans le temps, mais de vivre hors du temps. Et de vivre avec d'autres formes d'argent, d'autres formes monétaires, cultiver d'autres formes monétaires. Certes, il faut de l'argent pour pouvoir payer des trucs, etc., et vivre, et relativement vivre correctement, et il y a plein d'autres argents, par exemple, l'amour, une sorte de fraternité, de sororité, qui fait qu'on peut s'échanger des choses avec d'autres, le jardinage, et plein de trucs super cools qui permettent de se passer d'argent.
-Ok, merci. Combien il nous reste ? Il nous reste deux minutes. Est-ce que tu veux nous dire le nom de ton projet avant qu'on coupe ?
-Euh... Pour l'instant, il n'a pas un nom qui est fixe.
On se retrouve sous une forme qui s'appelle l'équipe du possible. Donc l'idée, c'est de trouver des possibilités dans l'instant présent, c'est-à-dire hors du temps. Même si on est à deux heures, la plupart du temps, on se réunit autour de deux heures.
Et de se transformer, de se lancer des défis, etc., comme je l'ai dit tout à l'heure. Alors moi, ma question, c'était plus, si on veut vous trouver, on fait comment ? Si on veut nous trouver, il va y avoir bientôt mon site web en ligne, gabriellechemin.com. Donc ça, c'est une première chose. Il y a ce podcast qui vient.
Il y a quoi d'autre ? Euh... Parfait. Déjà, c'est pas mal. Gabriellechemin.com Bon, merci.
Un petit mot de la fin ? Euh... Il va falloir s'y mettre. Je pense pas que c'est en se disant qu'on fait de la CNV, qu'on fait de la sociocratie, qu'on fait de la permaculture que ça suffit. C'est juste vraiment une partie... C'est la partie visible de l'iceberg, en fait.
Et les 70% qui restent à faire, c'est à déconstruire. Et déconstruire, ça veut dire vraiment en profondeur. Ça veut dire oser pleurer, oser avoir peur, vraiment.
Oser être en colère, vraiment. Et pour accéder à une vraie joie authentique. Voilà.
-Merci beaucoup, Gabriel. Merci à toi. A très bientôt.
-Ouais, salut.
Les Écovillages sont bien loins des représentations Françaises des collectifs. Au Sénégal, pays qui est le plus grand lieu d’accueil d’écovillages celà fait parti de la culture du pays. L’italie a reconnu dans sa juridiction la création de communautés et dispose aujourd’hui du réseau le plus étoffé d’Europe. En Europe et ailleurs dans le monde les écovillages peuvent avoir entre 100, 200, 400, 800 voir 2000 personnes ! En France un écolieu de 15 personnes est déjà considéré comme un grand écolieu (raison pour laquelle on parle plutôt d’écolieu que d’écovillage, ce qui parle aussi de la culture française). Source : https://ecovillage.org/
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